Portée par mes rêves
J'ai voulu oublier
Un quotidien qui n'est plus en accord
Avec moi-même
J'y ai vraiment cru
A ce garçon aux cheveux longs
A une belle histoire
Une histoire qui laisse des traces
Une histoire incomprise des autres
Une histoire n'appartenant qu'à nous
A chaque fois mon rêve s'est brisé
Souvent pas ma faute
Il y a une expression française
Qui dit
"mettre la charrue avant les boeufs"
J'ai voulu passer à la suite avant
D'avoir résolu un passé trop lourd
Trop long
A chaque fois la suite n'a eu lieu
De rendez vous manqués
En non dits incompris
Je me suisaccrochée à l'immossible
Accrochée à la couleur d'une jupe
En parfait accord avec des bas en soie
A ce chemisier en crêpe
Qui laisserait deviner un soutien gorge
En dentelles
...
Face à l'impossibilité
Après tant d'espérances
Je crois que dans ma tête
Quelque chose a disjoncté
Comme un circuit électrique
Sur lequel trop de choses sont branchées
J'ai perdu tous mes moyens
Sauf celuide sangloter
Nous avions rendez vous
Et rien ne se déroulait comme prévu
Comme je l'avais prévu
Dans la nuit de Paris
J'ai cherché un taxi
En vain
Maudits taxis
Je ne sais comment j'ai eu l'idée
De passer au bureau
Je devais savoir que mon ex
S'y trouverait
Mais je n'ai pas voulu penser
Je ne sais plus exactement comment
Les choses se sont envenimées
Je crois que je l'ai poussé
Bousculé
Il a tenté de m'immobiliser
Je l'ai frappé
Et contre toute attente
Il m'a frappé aussi
J'ai dû heurter quelque chose
La console de l'entrée
Peut être
La douleur m'a donné des ailes
Et je lui ai soté au visage
Toutes griffes dehors
Il s'est défendu
M'a donnée une claque
Je lui ai rendu
Je ne sais plus dans quel ordre
A la fin
Mon genou a violement heurté son entre-jambes
Je l'ai laissé plié en deux
Et j'ai courru dehors
Ce n'est que bien plus tard
Que l'air frais m'a fait prendre consicence de la douleur
Mes larmes ont coulé
En les essuyant
Je me suis rendue compte
Que mes doigts poisseux
Avaient essuyé du sang de mes lèvres
Après
Après je me suis assise sur un banc
Et j'ai pleuré
J'ai pleuré de frustration de ne pouvoir réaliser
Mon rêve
J'ai pleuré de ce qui venait de se passer
J'ai pleuré parce que ma vie
C'est de la merde
Et que je ne serai jamais à ma place ici
J'ai perdu la notion du temps
C'est le froid du petit matin
Qui m'a fait réaliser
Que j'avais passé la nuit dehors
En bougeant
La douleur s'est réveillée
Les douleurs
Où aller ?
Où aller ?
Pas à l'appart
Pas chez mon amoureux
Pas au bureau
Pas chez ma copine
Je suis seule dans la rue
Il faut que je voie mon visage
Un peu plus loin sur le boulevard
Une brasserie ouvre ses rideaux
J'entre tête baissée
Commande un café au comptoir
Et file au toilettes pour dame
Dans la lumière vacillante
Le mirroir renvoie le reflet
D'une femme à la lèvre enflée
Et ouverte
Du sang a séché sur ma joue
Ma tempe est tuméfiée
Et douloureuse
J'espère que mon oeil ne passera pas
Par toutes les couleurs
Je passe de l'eau sur mon visage
Longtemps
Quelqu'un vient frapper à la porte
Demande si ça va
Oui, j'arrive, merci
Il est cinq heures
Et Paris s'éveille
Et je suis contente qu'il n'y ait pas foule
Au comptoir
Le barman me dévisage discrétement
J'avale le café
Et lui demande combien je dois
C'est pour moi me dit-il
Il est sympas
Vous devriez porter plainte me dit-il
Oui, surement
Plus tard
Plus tard
Bien plus tard
Je sors du commissariat
Je n'ai pas porté plainte
La procédure
La procédure commence par une main courante
La procédure ne protège pas les femmes
Que faire ?
Je rentre à l'appart
Rien n'a bougé
Je suis ébétée
Choquée
J'ai fait changer les serrures
Ses serrures
Il comprendra bien
Que je ne veux pas le voir
Plus le voir
A propos de voir
Encore un rendez vous manqué
Comme une fatalité
Comme si le destin s'acharnait
A me faire entendre le message
"on ne tourne pas une page
sans résoudre le passé"
Je suis abîmée
Dehors et dedans
J'essaye de panser mes plaies
Dehors et dedans
J'essaye de faire comme si de rien n'était
J'essaye de m'accrocher à un rêve
Un rêve à deux
Mais je suis la seule à y rêver
Lui
Lui, je crois qu'il se fiche de moi
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